Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article
Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.
Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?
Inscrivez-vous gratuitement
L’agence de sécurité sanitaire rappelle les risques physiques et psychosociaux, pour ces travailleurs indépendants, liés à l’usage de l’intelligence artificielle pour l’attribution des courses, leur évaluation et même les sanctions.
Quand la course aux profits fait dérailler la santé : le management par l’intelligence artificielle (IA) des plateformes comme Uber Eats ou Deliveroo fait peser des risques sur la santé des livreurs de repas à domicile, alerte une agence sanitaire qui veut rendre obligatoire la protection de leur santé et de leur sécurité.
Accidents, risques psychosociaux, pollution de l’air… : l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a examiné les conditions de travail des livreurs à deux-roues et leur exposition pour son Evaluation des risques liés à l’activité des livreurs des plateformes de livraison de repas à domicile, rendue publique mercredi 26 mars.
Saisie par la CGT il y a quatre ans, elle s’est ainsi penchée sur les formes de travail créées par les plateformes. Pour « optimiser leur rendement économique », une IA attribue les livraisons « sans interaction humaine directe », décrit l’agence, livrant un panorama inédit d’une « organisation du travail à risque » pour la santé des plus de 71 000 livreurs indépendants en France, en grande majorité des livreurs de repas, selon l’Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi (ARPE).
« Evaluation des prestations par les consommateurs, évolutions des modalités de rémunération, règles d’attribution des courses », et même « sanctions » : tout est géré par des processus automatisés, avec des problèmes de santé physique et mentale en cascade, à court, moyen et long termes.
« Avec cette utilisation de technologies numériques pour attribuer des tâches de travail, les évaluer, surveiller les performances des travailleurs, les sanctionner, les livreurs n’ont pas de marge de manœuvre, de négociation possible, ni de soutien d’une personne physique qui pourrait répondre aux difficultés rencontrées sur le terrain », décrit à l’Agence France-Presse (AFP) Henri Bastos, directeur scientifique santé et travail à l’Anses.
En découlent des accidents de la route, des chutes, des troubles musculo-squelettiques et des atteintes à la santé mentale : « Stress, fatigue, épuisement liés à la pression constante des notifications, à l’isolement et à l’absence de relations professionnelles stables. » Les livreurs des plateformes souffrent aussi de troubles du sommeil, de maladies métaboliques, respiratoires ou cardio-vasculaires liées à l’activité exercée en horaires atypiques, dans un environnement de travail difficile : pollution urbaine, bruit…
« Il y a aussi des conséquences sociofamiliales : pour s’assurer un niveau de vie décent, les livreurs vont accepter un grand nombre de courses et donc avoir des amplitudes d’horaires importantes, travailler parfois sept jours sur sept », relève M. Bastos. Ces « stratégies, appelées “autoaccélération”, consistent à essayer d’anticiper les décisions prises par l’algorithme pour répondre à ses exigences, donc à intensifier le rythme de travail : elles conduisent à un épuisement physique et mental, et peuvent augmenter les accidents sur la route », détaille-t-il.
Or, en majorité indépendants, ces travailleurs ne bénéficient « ni d’une politique de prévention des risques adéquate ni d’une protection sociale suffisante », insiste l’agence. Il n’y a pas d’obligation de déclarer leurs accidents du travail.
Newsletter
« A la une »
Chaque matin, parcourez l'essentiel de l'actualité du jour avec les derniers titres du « Monde »
S'inscrire
En outre, le contexte réglementaire de cette activité est en construction. A l’échelle française, où un accord entre plateformes et syndicats fixant un revenu minimal horaire a été récemment signé, et européenne, les Etats membres ayant deux ans pour intégrer dans leur législation la directive de novembre 2024 renforçant les droits de ces travailleurs.
Ce texte prévoit de requalifier comme salariés quelque cinq des 30 millions de livreurs travaillant sous statut d’indépendant en Europe. Les modalités de requalification dépendent des Etats, ce qui permet à l’Anses de formuler des préconisations.
L’agence recommande ainsi aux pouvoirs publics de rendre obligatoire, pour ces travailleurs, l’application des dispositions en matière de santé et sécurité prévues pour les salariés dans le code du travail et d’imposer « une limitation et un contrôle de leur temps de travail ».
L’Anses « appelle à responsabiliser les plateformes, pour qu’elles assurent une protection de la santé et de la sécurité de ces travailleurs », qu’elles « fournissent les équipements (gants, casques…) nécessaires et une formation sur la sécurité routière, la santé et la sécurité au travail », résume M. Bastos.
Enfin, l’agence sanitaire veut rendre obligatoire la collecte de données pour continuer à documenter les effets de cette organisation du travail.
Le Monde avec AFP
Lecture restreinte
Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article
Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.