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Éditorial

Le Monde

Après des débuts chaotiques et 14 réformes en cinq ans, le dispositif s’est mué en un enfer bureaucratique propice aux malversations, poussant le gouvernement à le suspendre. Un échec qui risque de décourager les Français de poursuivre l’effort de décarbonation.

Publié hier à 10h30, modifié hier à 11h33 Temps de Lecture 2 min.

Une politique publique d’incitation n’est jamais évidente à mener. Il s’agit de trouver un subtil équilibre pour que le dispositif mis en œuvre soit suffisamment attractif pour encourager les changements de comportement, sans être trop dispendieux pour le budget de l’Etat, tout en limitant les effets d’aubaine et les escroqueries potentielles. MaPrimeRénov’, qui regroupe les aides à la rénovation énergétique des logements, n’y est pas parvenu, au point d’obliger le gouvernement à annoncer, mercredi 4 juin, sa suspension temporaire, afin de « reprendre la main » sur un dispositif en pleine dérive.

Proposée depuis le 1er janvier 2020, MaPrimeRénov’vise à inciter les propriétaires occupants à isoler leur logement et à adopter des systèmes de chauffage économes pour atteindre plus rapidement les objectifs de décarbonation que la France s’est fixés à l’horizon 2050. Près de 2 millions de Français en ont bénéficié à ce jour.

Après des débuts chaotiques, des modifications incessantes des critères d’éligibilité – il y a eu 14 réformes en cinq ans – et une réduction régulière de la part du financement de l’Etat, le dispositif a fini par être victime de son succès. A fin mai, l’enveloppe allouée pour 2025 est déjà largement dépensée. En période de disette budgétaire, le gouvernement, qui s’est fixé pour objectif de trouver 40 milliards d’euros d’économies en 2026, a décidé de mettre un coup d’arrêt à l’emballement.

Les bonnes intentions du départ se sont muées, comme souvent en France, en un enfer bureaucratique. La complexité inouïe de MaPrimeRénov’, avec ses dizaines de types de subventions, presque autant de formulaires à remplir, ses délais à rallonge pour toucher les versements, la difficulté à trouver des artisans certifiés, a créé une nébuleuse propice aux malversations. Tracfin, le service de renseignement contre la fraude, a détecté des mouvements suspects sur un montant total de 400 millions d’euros, soit 12 % de l’enveloppe globale de fonds publics. Il était temps d’arrêter les dégâts et d’en tirer les leçons.

MaPrimeRénov’est de toute évidence un dispositif mal calibré, qui a été lancé avec une certaine précipitation, sans anticiper les effets de bord, et qui est, selon un sondage récent, le service public qui recueille le moins de satisfaction auprès des Français. L’initiative a vu le jour en pleine crise du Covid-19, aux grandes heures du « quoi qu’il en coûte » et de l’argent gratuit. Ce contexte a inévitablement encouragé à voir trop grand, trop vite. Il aurait sans doute été utile d’expérimenter afin d’évaluer avant de généraliser.

Des ouvriers installent une pompe à chaleur dans une maison privée en Ille-et-Vilaine, en octobre 2023.

Par ailleurs, la fraude à la TVA sur les quotas de carbone à la fin des années 2000 nous a appris que, quand l’argent public coule à flots, cela attire les convoitises peu scrupuleuses. Faute d’avoir donné les moyens juridiques à l’Agence nationale de l’habitat, l’établissement public chargé de distribuer les subventions, de bloquer les dossiers, les fraudes ne pouvaient que se multiplier.

Ce fiasco est doublement dommageable. Il est de nature à entretenir le sentiment que l’argent public est mal dépensé, alors que les marges de manœuvre budgétaires sont de plus en plus contraintes. Surtout, ce « stop and go » permanent risque de décourager la bonne volonté des Français pour poursuivre leurs efforts en faveur de la décarbonation. Certes, MaPrimeRénov’sera relancée, sous une forme ou sous une autre dans quelques mois, mais cet échec laissera des traces, au moment où des politiques environnementales indispensables sont de plus en plus fragilisées.

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